LE HARCELEMENT SEXUEL D’AMBIANCE : UNE NOUVELLE NOTION JURISPRUDENTIELLE DONT LES ENTREPRISES DOIVENT SE SAISIR
10/06/2025
Cass. crim. 12 mars 2025, n° 24-81.644 FB
LES FAITS
En l’espèce, le président d’une université a saisi le procureur de la République pour dénoncer des propos et attitudes sexistes et dénigrants imputés à un maître de conférences en droit public.
Poursuivi du chef notamment de harcèlement sexuel par personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions s’agissant de faits commis au préjudice de quinze étudiants, l’enseignant-chercheur a été déclaré coupable de l’intégralité des faits qui lui étaient reprochés et condamné à douze mois d’emprisonnement avec sursis ainsi qu’à trois ans d’interdiction d’exercer l’activité professionnelle d’enseignant, outre les intérêts civils.
Par arrêt du 6 septembre 2023, la Cour d’appel relaxe le professeur. Les juges ont considéré que l’infraction n’était pas caractérisée au motif notamment que quatorze étudiants n’avaient pas été visés directement par les propos à connotation sexuelle ou sexiste tenus par le prévenu. Les agissements litigieux avaient en effet été adressés à la cantonade lors de cours ou de séances de travaux dirigés.
L’Université partie civile, à l’appui de son pourvoi en cassation, invoque un « harcèlement environnemental ou d’ambiance » qui, indépendamment du fait que la victime soit directement visée par les propos ou comportements à connotation sexuelle, est caractérisé « lorsque cette dernière y est personnellement exposée dans des proportions qui créent à son égard une situation hostile ou offensante ».
LA SOLUTION DE LA COUR DE CASSATION
La Chambre criminelle suit le raisonnement de l’université et rappelle que des propos à connotation sexuelle ou sexiste adressés à plusieurs personnes, ou de tels comportements susceptibles d’être imposés à chacune d’entre elles peuvent suffire à caractériser le délit de harcèlement sexuel. La répétition de propos sexistes ou sexualisés visant une personne déterminée ne constitue donc plus un prérequis.
Très récemment, dans le cadre de l’affaire France Telecom, les juges répressifs avaient considéré que, s’agissant du délit de harcèlement moral, la caractérisation de l’infraction n’exige pas que les agissements reprochés à leur auteur concernent un ou plusieurs salariés en relation directe avec lui ni que les salariés victimes soient individuellement désignés. La notion d’harcèlement institutionnel ou encore le harcèlement sexuel d’ambiance sont donc deux notions issues de la jurisprudence dont les employeurs doivent désormais tenir compte dans leur approche RH.